Détruire dit-il

4 octobre 2014 par - économie numérique

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À peine nommé président de la commission européenne Jean Claude Juncker s'est trouvé un adversaire à sa mesure un pelé, un galeux qui freine le développement de l'Europe numérique et empêche la création de millions d'emplois.

Ce détestable personnage à la mine patibulaire, c'est le droit d'auteur .

En tant que lointain héritier de Pierre Augustin Caron de Beaumarchais et de la révolution française qui l'enfantèrent, je sens le vent mauvais qui nous vient de Bruxelles et de Luxembourg et commence à éprouver le sentiment de culpabilité de celui qui empêche la jeunesse européenne de trouver du travail.
Il est vrai que la propriété littéraire et artistique a la malchance de pas inclure en son sein la protection des appellations d'origine contrôlée spécialement vinicoles car sinon il est certain que le président de la commission aurait veillé soigneusement à lui garantir un avenir paisible et radieux.
Les grandes sociétés américaines qui dominent le commerce numérique peuvent se réjouir,  les dizaines de millions de dollars investis en lobbying auprès des instances européennes vont rapporter gros et leur permettre d'étendre encore leur influence et d'accroître leurs bénéfices .
Nelly Kroes qui a bataillé sans succès contre Michel Barnier pour affaiblir les droits des créateurs tient une revanche posthume qui justifie ses déclarations d'amour aux maîtres des transactions électroniques .
Bertrand Tavernier l'a brillamment rappelé : il y a erreur sur la personne et le droit d'auteur n'est en rien responsable de certaines difficultés à développer en Europe de nouveaux services numériques.
En France les auteurs sont intéressés  à la fortune bonne ou mauvaise de leurs œuvres .
Outre le fait qu'ils créent pour le plus large public, ils ont un intérêt financier direct à la meilleure exploitation possible et à la plus large circulation.
Ce n'est pas le cas dans beaucoup de pays d'Europe où dominent des pratiques forfaitaires qui font des auteurs les coolies de commerçants peu scrupuleux.
Ce serait une belle et noble ambition de s'inspirer  de l'esprit du siècle des lumières en donnant  à tous les créateurs européens des droits sur leurs œuvres .
Hélas, trois fois hélas,  la bureaucratie bruxelloise n'a ni le cœur ni le souffle pour remettre les créateurs au centre de la propriété littéraire et artistique.
Elle a  exactement la même pensée ringarde qu'à l'époque de l'élaboration de la directive "Télévisions sans frontières "quand les eurocrates prétendaient que le droit d'auteur était un obstacle au développement des télévisions européennes.
Ils ont été démentis par les faits, mais le renouvellement de leur pensée étant aussi fréquent que les élections au Paraguay, la même rengaine nous est à nouveau chantée.
Certaines pratiques commerciales  peuvent effectivement compliquer la vie des opérateurs , mais beaucoup d'entre elles sont justifiées par la nécessité de financer les œuvres sur une base territoriale et sur des différences culturelles qui sont notre richesse.
Globalement le droit d'auteur a été harmonisé.... par le haut. Est cela qui dérange ? Est ce cela que Juncker  veut remettre en cause ?
En quoi le libre choix des États de définir dans une liste préétablie les exceptions qu'ils souhaitent apporter aux droits exclusifs est elle une contrainte pour ses chers amis Tim Cook et Larry Page ?
Bien sûr ces braves gens vont nous promettre monts et merveilles et surtout beaucoup d'emplois dans les activités numériques.
Les mêmes promesses que celles qui accompagnent chaque négociation d'un traité de libre échange.
La culture et la création n'ont rien à attendre de la commission  européenne .

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