Mon chèque

7 février 2010 par - Weblog

L'Autorité de la concurrence vient de rendre sous la signature d' Elisabeth Flüry-Hérard qui occupa plusieurs fonctions de direction au sein du CNC un avis très attendu sur la proposition  visant à créer un fonds de mutualisation dont l'objectif d'intérêt général est de ne laisser aucune salle de cinéma sur le bord de la route qui ménera l'ensemble de l'exploitation française à numériser ses systèmes de projection.

La numérisation pose, en effet , le problème de la juste répartition des coûts et avantages entre exploitants et distributeurs, les premiers supportant la dépense relative à l'acquisition du nouveau matériel et les seconds faisant de substantielles économies sur les frais de tirage de copies.

Comme l'explique très bien l'autorité de la concurrence :" l'économie du cinéma numérique repose sur un paradoxe:

les investissements sont supportés par les exploitants et les gains en résultant vont être, pour l'essentiel, captés par les distributeurs."

De cette contradiction est née une nouvelle fonction le tiers investisseur qui joue un role d'intermédiaire entre le distributeur et l'exploitant en reversant à ce dernier un droit d'usage de la copie numérique qui lui permet de financer son équipement.

Tout serait parfait dans le meilleur des mondes libéral si comme le reconnait le régulateur concurrentiel lui même environ 500 salles compte tenu de leur situation économique ne pourront bénéficier de ce mécanisme de marché.

D'où l'idée défendue par le CNC d'un fonds de mutualisation géré par lui et permettant d'offrir à tous le cinéma numérique.

Une idée noble et généreuse mais qui a trouvé dans l'Autorité de la concurrence un censeur impitoyable rappelant fermement que " l' intervention directe du régulateur sectoriel est de nature à créer d'importantes distorsions de concurrence, voir à éliminer toute concurrence sur le marché du financement du cinéma numérique."

En bref le CNC n' a pas à se transformer en entreprise et à se substituer à celles qui interviennent déjà sur ce marché.

Tout au plus, peut -il, car la légitimité de son intervention n'est pas contestée, utiliser les outils classiques dont il dispose et créer une taxe sur les copies numériques pour financer l'équipement des salles les moins favorisées.

Ce sérieux revers devrait contraindre le CNC à se remettre à l'ouvrage et à proposer un autre système permettant d'assurer la solidarité entre les différentes branches professionnelles sans porter atteinte au bon fonctionnement des règles de concurrence.

Dommage pour les créateurs que cette volonté interventionniste existe si peu dès lors qu'il s'agit de faire respecter les droits des auteurs.

Je ne saurai que conseiller à toutes les éminences qui babillent au lieu d'agir de lire le dernier ouvrage de Jean Claude Carrière auquel la SACD vient de rendre un hommage mérité " Mon chèque" qui raconte les aventures d'un scénariste à la recherche de son chèque perdu dans les méandres d'une société de production et les milles ruses du producteur pour éviter de s'acquitter de sa dette.

Mais, il s'agit surement une autre époque, celle des derniers nababs, car de nos jours comme l'ont scrupuleusement établi deux études du Ministère de la culture et le rapport Bonnell remis il y a plus d'un an, de tels errements à l'évidence n'existent plus.

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Commentaires (1)

 

  1. Lucien Véran dit :

    Lien durable et partage des investissements.

    Les cas ne sont pas rares où les investissements (ou les efforts) de l’un permettent à l’autre de faire de meilleures affaires, c’est même une caractéristique classique des investissements publics. Dans le domaine du film, très tôt les grands réseaux de salles nord-américains et les distributeurs comprenant bien que leurs intérèts étaient liés ont contruit le système des VPF qui est d’une certaine manière une formule de développement équitable mais réservé au cercle de ceux qui ont l’habiude de faire des affaires ensemble, qui en font assez et en feront assez longtemps pour qu’un tel mode de co-financement ait un intérèt.

    Mais l’on est encore sur l’idée d’une copie qui toute virtuelle qu’elle soit renvoie à un lien univoque : « salle-écran-copie » Si ce lien se perd (salle et film se rencontrant en fonction de la dynamique de la demande) rien n’interdit d’imaginer que le matériel de projection ne soit plus la propriété de l’exploitant et soit entièrement financé comme à une époque les combinés téléphoniques (tiens, tiens) par un diffuseur ou un opérateur lui même fournisseur ou non d’un contenu.

    L’essentiel reste le lien commercial durable qui conditionne l’appropriation des matériels et qui bien sûr oblige à s’interroger sur l’indépendance (source de diversité dit-on) des exploitants.

    Bonne journée.

    Lucien Véran.

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