Le Gourou est de retour

20 décembre 2011 par - Weblog

Il est désormais demandé aux candidats à la Présidence de la République de tout savoir et d'avoir réponse à tout.

Ce qui était avant affaire de spécialistes, le droit d'auteur devient par la grace d'Internet un sujet à la portée de tous pour lequel point n'est besoin d'avoir suivi les cours du soir des professeurs Pierre Sirinelli ou André Lucas et avalé  le traité d'Henri Desbois pour exprimer une opinion.

La religion d'une majorité des chercheurs d'électeurs est d'ailleurs déjà toute faite : il faut faire d'Internet une grande zone de liberté de circulation des oeuvres tout en assurant la rémunération des créateurs.

C'est dans cet esprit que la candidate d'Europe-écologie-Les verts Eva Joly s'est exprimé récemment dans le Nouvel Observateur .

Pour Eva Joly, Hadopi est déjà condamnée, une condamnation impitoyable :

"Nous voulons une abrogation pure et simple de l'Hadopi, qui est une absurdité. Une instance extra-judiciaire ne peut pas décider de priver les citoyens d'une liberté aussi fondamentale que l'accès au net, donc de l'accès au monde. Pour nous, cette idée est insupportable."

Petit problème pour l'ancienne magistrate, une grande méconnaissance de la loi qui ne reconnait aucun pouvoir de sanction à l'Hadopi et prévoit seulement qu'elle est habilitée à transmettre à la justice les constats pouvant aboutir sous le controle du juge à une décision de suspension de l'accès à Internet.

Mais bon, chacun sait que même une candidate à la Présidence de la République peut ignorer la loi .

Après la condamnation de l'Hadopi, il faut naturellement passer, exercice obligé, à l'autre volet du sujet la question de la rémunération des créateurs .

Et là hors de propos d'aller à la rencontre des auteurs français, non il est beaucoup plus " hype " ,plus vrai chic high tech de faire sortir de sa boite  et plus exactement du vol New York-Paris le gourou Richard Stallman :

" L'idée de Richard [Stallman] de redistribuer les bénéfices à tous les acteurs est très intéressante. Il s'agit de faire payer aux internautes une somme forfaitaire mensuelle. Les internautes pourront alors attribuer jusqu'à un tiers de cette somme aux artistes et oeuvres de son choix. Le reste sera réparti selon un sondage de popularité qui prend en compte la racine cubique - par exemple, un artiste qui sera 1.000 fois plus populaire sera payé 10 fois plus. C'est novateur et cela permet d'instaurer une nouveau rapport entre internautes et artistes. "

Idée génialissime, la rémunération proportionnelle inventée par Beaumarchais et la révolution française devient racine cubique en étant  frappée d'un abattement de 100 sorte d'impôt sur la trop grande fortune de certaines oeuvres permettant une redistribution aux artistes méconnus .

Deuxième innovation un tiers des ressources collectées seront laissées à la discrétion des internautes qui pourront ainsi sans doute, outre des artistes de valeur encourager au sein de leur famille les vocations créatives.

Rien de celà n'est juridiquement faisable puisque le droit d'auteur est harmonisé à l'échelle européenne par plusieurs directives et mondialement par des traités internationaux que la France est tenue de respecter.

Mais qu'importe ,le temps électoral est celui, surtout en période de crise, où il est doux de rêver et de faire rêver

Que ce soit  aux dépens de ceux dont c'est le métier n'est qu'un détail.

 

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Commentaires (11)

 

  1. DM dit :

    Je constate avec amusement l’effet que RMS produit sur vous.

    Je relève que Mme Joly n’a nullement dit qu’elle comptait mettre en œuvre ses propositions, mais qu’elle les trouvait « intéressantes ». Il y a quantité de propos que je trouve intéressants sans pour autant vouloir les suivre.

    Enfin, s’agissant d’un programme politique à long terme, celui-ci peut prévoir la renégociation de traités. C’est un peu délicat s’agissant d’EELV (qui se réclame de l’Europe), mais s’agissant, par exemple, de Mme Le Pen, il me semble que son programme implique une renégociation et/ou un abandon massif de traités.

  2. vampire dit :

    Insupportable en effet.

    Bravo Monsieur Rogard, de dire tout haut ce que l’illuminée verte aux lunettes rouges ne parvient à voir ! Paf, dans les gencives !

    D’ailleurs pour cette violation des termes de la loi, il faudrait condamner à Nanterre la Joly Eva, à disons… 1 million d’euros de dommages et intérêts !

    Ho wait !

  3. fb251 dit :

    Sur la coupure confiée à une instance extra-judiciaire puis-je irrespectueusement vous rappeler que c’était exactement la teneur d’Hadopi, telle que tortueusement pensée par de brillants juristes (au fait, vous avez oublié Olivier dans votre liste) avec la bénédiction sans faille du gouvernement.

    Brillants juristes, probablement fins connaisseurs de l’art et la matière de bricoler le CPI, mais ce qui n’a néanmoins pas empêché le recalage de la loi pour méconnaissance crasse de la Constitution[1].

    [1] http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2009/2009-580-dc/decision-n-2009-580-dc-du-10-juin-2009.42666.html

    • Pascal Rogard dit :

      Exact mais le conseil constitutionnel à tranché et donc la loi en vigueur contrairement à ce qu’affirme Eva Joly ne donne pas pouvoir à l’Hadopi de faire suspendre l’accès à Internet.

      • yann dit :

        Tout comme le CSA routier, aux fondements juridiques issus de la loi Gayssot, précise que le titulaire de la carte grise est présumé coupable « à moins qu’il n’établisse qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction ».

        Précision qui fut là encore ajoutée in extremis pour éviter la censure du CC…

        La situation était alors cependant au départ plus favorable: 100% des flasheuses prenaient de l’avant. Si une femme conduisait alors que le titulaire de la CG est un homme… peinard… et sinon une copie de sa carte d’identité avec photo visible avec la contestation.

        C’est pourquoi on a retourné 90% des radars! Pour faire plus honnête, on a dit que c’était pour viser les motards (1% du traffic, dans une optique de rendement de l’affaire, quel imbécile peut y croire?) qui n’ont pas de plaque avant.

        Officieusement, c’était pour ne pas fournir sur un plateau le motif de contestation aux innocents.

        Dans le cas d’Hadopi… il n’y aura même pas cet obstacle à l’industrialisation de la sanction! Quel bonheur n’est-ce pas?

        Encore une fois, pour entrevoir la suite… regardez l’application de la loi qui sert de modèle depuis 10 ans…

  4. yann dit :

    « Petit problème pour l’ancienne magistrate, une grande méconnaissance de la loi qui ne reconnait aucun pouvoir de sanction à l’Hadopi et prévoit seulement qu’elle est habilitée à transmettre à la justice les constats… »

    Pour voir si Mme Joly a vraiment tords, observons le modèle: Le controle sanction automatisé routier (remplacez titulaire de la carte grise par celui de l’abonnement internet et le parallèle est clair).

    Nous avons dans ce cas des radars opérés par le privé générant des infractions traitées par un autre prestataire privé, à Rennes… normalement sous le controle d’OPJ validant chaque infraction, donnant suite aux contestations etc…

    Dans les faits: Un seul OPJ signe tous les PV (Maréchal des Logis Pichon, d’ou l’expression « se prendre un Pichon » qui remplace « se prendre une prune »!)… et les contestations, avec un système de consignation trompeur (attention à ne pas confondre avec le paiement de l’amende, valant reconnaissance implicite de l’infraction!), arrivent toutes à la limite de temps obligeant ceux qui veulent croiser le fer avec l’état à porter plainte. Il y a intérêt à ne pas avoir fait un envoi par lettre simple, comme c’est demandé!

    Bref, sur la déclinaison pratique de cette mascarade qu’est Hadopi, Mme Joly qui a été juge a parfaitement raison et je pense que son discours est parfaitement compris.

    Dommage qu’elle soit si entêtée sur le nucléaire…

    • Pascal Rogard dit :

      C’est pourquoi le systéme Hadopi est bien différent de celui des controles routiers.Au fonds ce ne serait pas désagréable lorsqu’on a dépassé la vitesse autorisée de recevoir un mel d’avertissement au lieu d’une contravention et d’un retrait de points

      • Jul dit :

        Au fond la Hadopi ne dispense pas les ayants droits de porter plainte pour contrefaçon. Elle rajoute juste un délit bidon, parce que porter plainte pour contrefaçon coutait trop cher aux ayants droits, qui *rajoute* une couche de sanction en plus.
        D’ailleurs, le délit tel qu’utilisé par la loi Hadopi se base sur le fait qu’une contrefaçon a été détectée sur une IP pour dire que la ligne n’est pas sécurisée. Il faudrait cependant prouver que l’œuvre est effectivement diffusée sans autorisation, et donc qu’il y a effectivement contrefaçon. Le but de la commission Hadopi est juste de faire avouer au choix de la personne convoquée :
        – un délit de contrefaçon (peine de prison + grosse amende)
        – un délit de non sécurisation (amende + coupure internet + poursuite pour contrefaçon toujours possible)
        En gros, choisir entre la peste et le choléra. D’où l’importance de ne rien dire devant la commission, et de contester l’ordonnance pénale systématiquement. Afin d’avoir le droit à un VRAI procès.

        Au passage, la seule sécurisation absolu de son forfait internet, c’est sa résiliation. Il est juste impossible d’empêcher son adresse IP d’être utilisée à l’insu de son plein gré comme qui dirait. Cf les adresses IP attribuées à l’Élysée qui se retrouvent dans des trackers P2P.
        Bien évidemment, comme c’est l’Élysée, c’est forcement une erreur hein. Enfin une IP de l’Élysée, ce n’est pas une preuve fiable. Alors qu’une IP d’un internaute lambda si. Parce que vous voyez, y’a la bonne IP, et la mauvaise IP …

        • Pascal Rogard dit :

          Je vous conseille si vous êtes un contrefacteur non repenti d’aller au « vrai procès ».Vous risquerez ainsi en plus des sanctions pénales des dommages et intérêts à régler à ceux que vous aurez lésés.
          Pour mémoire ,les professionnels du cinéma n’ont jamais poursuivis les simples internautes au pénal sauf dans les rares cas où ils étaient impliqués dans des procédures mettant en cause des bandes organisées.

      • yann dit :

        De nos jours, internet est de plus en plus nécéssaire! Bientôt obligatoire (démarches adminsitratives…)?

        Bien des gens télétravaillent quelques jours par semaine… et ont un besoin de plus en plus fort d’un accès fonctionnel… surtout s’ils se sont fait piquer le permis par le modèle de cette hérésie hadopiste.

        Ne dites donc pas que la sanction serait transparente, cela peut aller au delà du mail et si Bercy n’arrive pas à sécuriser son infrastructure, qui a été trouée il y a qq mois, je ne voit pas comment on peut pondre une loi qui y oblige tout un chacun.

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