Anciens et modernes

3 septembre 2015 par - Weblog

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La longue période de 4 mois de tuilage à la tête de France Télévisions – 2 mois de plus que pour la présidence des USA il est vrai beaucoup moins complexe et prestigieuse – a pris fin le 22 août avec la prise de fonctions effective de Delphine Ernotte à la barre du vaisseau amiral de l'audiovisuel public, à qui l’on souhaite évidemment d’éviter les récifs et d’atteindre des rives hospitalières pour la création française.

Il n’aura pas fallu attendre bien longtemps pour que le Landerneau politique et médiatique, encore bronzé, commence à s’agiter, s’interrogeant sur la pertinence des premières annonces de la nouvelle présidente.

C’est moins le projet de chaîne d’information en continu du groupe public que ses déclarations appelant à une réforme de la redevance audiovisuelle, rebaptisée depuis contribution à l’audiovisuel public, qui ont réveillé une querelle entre des audiovisuels supposés anciens, mais qui ne le sont pas vraiment, et des numériques soi-disant modernes, mais déjà un peu vieillots, sans oublier les arrière-pensées politiques de ceux qui voient les élections approcher à grands pas.

Que n’a-t-on entendu ces derniers jours ! Attaque ignoble contre le pouvoir d’achat des français, taxation forcément injuste et inique du numérique…

Il est décidément difficile d’avancer sans passion sur le terrain de cette contribution à l’audiovisuel public, qui ne sert d’ailleurs pas qu’à financer France télévisions mais l’ensemble des entreprises de l’audiovisuel public.

Aujourd’hui, la contribution à l'audiovisuel public , dont le niveau en France reste bien loin de celui de nombre de pays européens (Allemagne, Grande-Bretagne…), malgré l’indexation sur l’inflation et le coup de pouce de ces dernières années, risque d’être à bout de souffle. Créée en 1949, elle repose encore sur la possession d’un support, l’écran de télévision, qui n’est plus, sauf erreur de ma part, le seul moyen de regarder des émissions et des programmes télévisées.

La taxe sur les services de télécommunication destinée à financer la suppression de la publicité après 20h a été captée par le budget général et détournée de son objet.

Les propositions de réforme sur la table ne sont pas révolutionnaires. Il ne s’agit pas forcément de faire payer plus ceux qui sont déjà assujettis au paiement de la redevance, mais d’y soumettre ceux qui peuvent avoir accès au service public par d’autres moyens qu’un téléviseur. Bref, élargir de l’assiette de la redevance.

Est-ce juste et utile ? Oui, car il est possible qu’à court terme, l’équipement des foyers en téléviseurs connaisse une baisse, plus ou moins rapide, au profit de nouveaux supports qui ne financent pas aujourd’hui l’audiovisuel public. Le risque de décrochage du rendement de la redevance est loin d’être une vue de l’esprit.

Et le principe de neutralité technologique voudrait que l'assujettissement à la  contribution ne soit pas lié au mode de réception du service.

Pour faire quoi ?

Ceux qui aiment sonner le tocsin et pousser des cris d’orfraie quand ils entendent le mot redevance n’aiment manifestement pas se poser cette question. C’est pourtant la seule qui vaille : quel projet de service public ? quel rôle pour la télévision publique dans la cité ? Comment sortir l'information de l'instantanéité panurgienne  ? Quelle place pour la création dans un groupe audiovisuel qui structure la vie culturelle de ce pays, en finançant plus de 50% de la fiction française, en investissant près de 60 millions d’€ dans le cinéma et en se faisant le relais, parfois trop tardivement, de la création de spectacle vivant ?

Voilà les enjeux qui comptent et qui doivent aussi trouver des réponses en termes de ressources financières dont la pérennité doit être à terme autant assurée et garanti que le budget de la culture .

Cela n’exclut pas les efforts de gestion qui peuvent être faits. Mais, un service public sans idées sans ambitions, sans volonté de se développer et de consolider ses moyens serait une entreprise fragilisée, déstabilisée et sans avenir. Cela ne semble pas être le crédo de Delphine Ernotte et c’est tant mieux !

Espérons qu'elle sera entendue.

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