La copie privée en débat public

3 novembre 2011 par - économie numérique

 Plus de 25 ans après sa création par la loi Lang sur le droit d'auteur dont il convient de rappeler qu'elle fut adoptée à l’unanimité, le Parlement français va se pencher à nouveau sur cette question importante pour la création française.

Rappelons d'abord, en particulier à nos amis journalistes (qui ignorent que la presse en bénéficie) que la rémunération copie privée n'est pas une taxe, mais bien une rémunération de droit d'auteur et de droits voisins contrepartie d'un régime de licence légale qui permet aux particuliers de copier les œuvres audiovisuelles, sonores, écrites et graphiques dès lors que l'usage de ces copies reste cantonné au cercle de famille.

La loi française a été conçue dans un environnement analogique au sein duquel n'existaient que deux supports d'enregistrement dédiés l'un à la copie privé des œuvres sonores et l'autre à celle des œuvres audiovisuelles et cinématographiques.

L'arrivée du numérique a changé beaucoup de choses car les supports d'enregistrement ne sont plus dédiés à la copie privée mais ont de multiples usages. Par ailleurs le développement de la contrefaçon numérique a permis aux particuliers d'effectuer des copies à partir de sources illicites cas de figure inexistant au moment où la législation a été adoptée.

Après l'annulation par le Conseil d'Etat de décisions de la commission pour des motifs juridiques extérieurs à son fonctionnement et en particulier un arrêt de la CJCE concernant l'assujettissement des usages professionnelles en Espagne, il est apparu nécessaire au gouvernement d'adapter le dispositif aux nouvelles technologies et de prendre compte les décisions de la juridiction administrative.

Un projet de loi sera bientôt examiné par le Parlement permettant ainsi de moderniser un dispositif juste et efficace qui présente en outre l'avantage de mutualiser au bénéfice de la création française et des jeunes talents 25% des sommes ainsi collectées.

Les importateurs de matériels d'enregistrement ont violemment critiqué ce texte qui vise à sécuriser un élément important de la rémunération de la création française.

Une protestation assez cocasse de la part d'entreprises qui ont détruit des milliers d'emplois en délocalisant les fabrications dans le sud-est asiatique et qui osent sans aucune pudeur protester contre une rémunération créatrice d'emplois artistiques localisés dans notre pays.

Ce qui est aussi d'un comique enivrant c'est la vidéo star du Simavelec dans laquelle un intermittent de la commission réclame l'adoption de la mesure que j'avais proposé d'affichage du montant de la copie privée incluse dans le prix de chaque support d'enregistrement.

Que le Pierre Larquey du matériel électronique se rassure cette mesure figure dans le projet de loi. Elle avait d'ailleurs déjà été proposée dans un autre texte concernant les droits des consommateurs.

La copie privée est un système de rémunération de la création qui assure au public un large accès aux œuvres.

Les difficultés juridiques incontestables consécutives à l'essor des supports d'enregistrement numériques ne remettent pas en cause comme l'a souligné le Conseil d'Etat son incontestable nécessité.

Le gouvernement en s'engageant au côté des créateurs a parfaitement compris qu'en temps de crise soutenir la culture est aussi une action positive pour l'économie.

Continuez votre lecture avec



Articles similaires


Commentaires (17)

 

  1. Lolilol dit :

    Juste ? un CD vierge coute quelque centimes à produire la taxe dessus est de 0.35€… Un DVD vierge coute à peine plus, la taxe est d’1€… Un disque dur de 250 à 500Go (hors période d’incident en thaïlande) coute au plus 40€, la taxe est d’au minimum 45€…

    C’est très juste en effet, une taxe qui fait toujours doublé quand c’est pas multiplié par 10x ou 15x le prix du support… Avec l’affichage ça serait drôle. DVD : 0.07cts, taxe sacem 1€

    • Pascal Rogard dit :

      Il y a le prix du support fabriqué en Asie et le prix de la création élaboré en France et en Europe.
      Et ce n’est pas le même . Ce qui a de la valeur ce n’est pas le support s’enregistrement , c’est l’oeuvre copiée.

      • yann dit :

        Reste qu’au final, sur un Blue-Ray, la taxe a été totalement dissuasive: Ce support n’a pas perçé en raison de ce problème en temps que stockage informatique.

        Et dorénavant, un support numérique sans débouché informatique est tout simplement mort: Tué dans l’oeuf.

        Alors qu’un film privé-copié sur DVD ou BR… C’est la définition de la copie qui change le « droit d’auteur »?

        Bref, il y a une limite à la goinfrerie qui semble atteinte… les gens ayant réagi: D’ailleurs, gageons que les box internet suivront les disques réseau bientôt.

        Fournies sans disque dur, mais facile à installer après avoir acheté un modèle interne non taxé?

        Et c’est un peu une histoire d’oeuf et de poule: Les fabricants ne pouvant échapper à la taxation, la pression continue sur les couts se reporte sur la fabrication… Ce n’est j’en conviens pas la seule raison, mais cela n’améliore pas le tableau quand la taxe dépasse largement le cout du support.

        Vous voulez en gros faire pire que la TIPP… sur un produit dont on peut se passer contrairement aux carburants!

        Tuer le support physique quand on vit de sa copie, ce n’est quand même pas très malin… enfin c’est mon avis!

        Par ailleurs je vous avoue qu’être taxé sur les cartes mémoires, que je n’utilises pas ailleurs que dans appareil photo/camescope, ca a tendance à bien me déculpabiliser vis à vis de la copie.

        L’effet est donc aussi psychologique… après avoir mis le doigt dans l’engrenage (et appris à utiliser les bons outils) en raison des CD copy controlled qui ne passaient pas sur ma platine de salon.

        Quand ca fait plus de 10 ans que l’on se tire des rafales dans les pieds… il ne faut pas jouer au caliméro. Question de décence.

  2. Marc dit :

    Les professionnels de l’Informatique vous remercie pour cette « rémunération » indue qui est prélevée sur chaque CD, DVD, clé USB, mémoires Flash, massivement utilisés avant tout dans le domaine pour lequel ils ont été crées : le stockage de 0 et de 1…

    Il est tout à fait normal que des artistes récupèrent leur dû sur le travail d’autrui comme la sauvegarde de bases de données, l’envoi de maquettes de progiciels, la création d’images système pour le déploiement de parcs bureautique, l’archivage de transactions, le transports de documents de travail, ou plus généralement la distribution de toutes données issue d’une réalisation électronique !

    Bien sur les artistes ont massivement participé au développement de ces technologies que ce soit dans le domaine du laser, du semi-conducteur, du stockage magnétique et du traitement de l’information en générale.

    Comment dois-je percevoir le fait que ma profession soit vampirisé par des artistes (chanteurs, acteurs, musiciens, producteurs, éditeurs, auteurs…), alors que les systèmes d’informations que je conçois sont destinés à assurer la qualité et la sécurité des transports ou des réseaux énergétiques ?

    • Pascal Rogard dit :

      Merci de votre hommage justifié à Roman Polanski et à son fameux bal des vampyres.
      Contrairement à ce qui est écrit dans certaines feuilles de choux ,les usages professionnels étaient bien pris en compte dans les décisions de la commission soit par exonération pour certains supports conformément à ce qui était prévu dans la loi soit par un abbattement appliqué au tarif de chaque support .
      C’est ce système d’abattement qui doit être revu en application de la décision de la CJCE .

      • fb251 dit :

        Tellement bien pris en compte que les services d’imagerie médicale (y compris ceux des hôpitaux publics) payent la RCP plein pot alors que l’usage des supports numériques est exclusif sauf abus de confiance de la part des salariés ?

        Ce n’est pas le système d’abattement (si tenté qu’il ait existé un jour) qui est remis en cause par la CJUE et par le CE, c’est l’enrichissement sans cause. Nuance.

      • Ben dit :

        Mais bien sûr .. Un rapport du Conseil d’Etat a clairement expliqué que lesdits abattements dont parlait la commission copie privée n’étaient présents dans aucune décision publiée de la commssion copie privée (sauf celles tenus APRES la décision d’annulation du CE).

        Je cite : « Rien ni dans les visas, ni dans les considérants, ni dans les articles, ni dans les tableaux de la décision ne permet de tenir pour établi qu’une réfaction ait été appliquée pour certains supports. Il en est de même pour la décision n°8 à laquelle se réfère le ministre. »

        Deuxième passage : « certains tableaux produits, sensés avoir fait l’objet de débats, comportent une colonne intitulée ‘part support professionnels’. Mais d’une part la signification n’est pas explicite, d’autant que pour d’autres colonnes, le terme ‘abattements’ est indiqué et correspond à des abattements dont les considérants ou les articles de la décision font mention. D’autre part, à supposer qu’il s’agirait de pratiquer un abattement pour un usage professionnel, même si le terme n’est pas employé, il n’est pas possible d’établir la corrélation entre ces tableaux et ceux de la décision ».

        Et le rapporteur du conseil d’état de conclure :  » Au vu de l’ensemble de ces éléments il ne nous parait pas possible de tenir pour établi qu’un abattement soit opéré pour certaines catégories de supports en vue de tenir compte des usages professionnels dont ils font globalement l’objet ».

        Il semblerait donc que pour rattraper le coup, les membres de la commission aient imaginé a posteriori ce mécanisme d’abattement pour garantir qu’après annulation de la décision, on augmente la part des particuliers dans la même proportion que l’on diminue celle des professionnels dans le but de garder une rémunération globale constante.

        Un commentaire, monsieur Rogard ?

  3. kamui57 dit :

    Cool, sous prétexte que j’achète un cd/dvd qui peut être utilisé pour copier de la musique/des films gérés par la SACEM/SACD, on considère que nécessairement je le ferais ? Or la grande majorité de ce que je copie c’est des distributions GNU/Linux et de la musique en Creative Commons. La RCP ne va pas à GNU/Linux ni à ces musiciens.

    Tous les contenus licites ne devraient également pas être pris en compte. Lorsque vous achetez un cd puis le copiez, vous avez un exemplaire en votre possession (le cd) que vous copiez ailleurs. Lorsque vous achetez de la musique en ligne, vous copiez un original contenu ailleurs, sur un autre ordi (un serveur). La copie est donc le premier exemplaire en votre possession et donc amha ne devrait pas être sujette à RCP. Exemple : itunes, beezik, vod…

    Vous bafouez le téléchargement illégal, mais la RCP perçue illégalement va-t’elle être remboursée ?
    http://www.pcinpact.com/news/66810-copie-privee-montants-illicites-professionnels.htm

    • Pascal Rogard dit :

      Vous devriez avoir de meilleures lectures comme la décision du CE qui n’a pas d’effet rétroactif ce qui exclut donc tout remboursement

      • vampire dit :

        Et pour les malotrus qui auraient osé lancé une procédure depuis Padawan, le projet de loi s’occupe de leur réduire leurs espoirs par des conditions que la directive ne pose pas.

      • yann dit :

        PCinpact a fait une comparaison intéressante à ce sujet… comparant aux victimes de l’amiante a qui on demande de rembourser des sommes allouées par le justice, désormais jugées excessives, des années après!

        2 poids, 2 mesures. Ce que vous soulevez en paravent est un scandale total.

        • Pascal Rogard dit :

          Ce qui me frappe dans le système de communication d’Internet c’est sa facilité à propager des balivernes .
          Cette comparaison entre la copie privée et les victimes de l’amiante en une belle illustration.
          La commission copie privée à fixé des barèmes tenant compte des usages professionnels par un système d’abattement applicable aux différents support.
          C’est cette méthode qui a été annulé par le Conseil d’Etat suite à une décision de la CJCE
          Il n’y a donc pas eu de trop perçu .

  4. Marc dit :

    — Ce qui me frappe dans le système de communication d’Internet c’est sa facilité à propager des balivernes. —

    Alors que la communication unidirectionnelle des médias de masse ne sert qu’à propager la vérité ! (du moins celle de ceux qui les contrôlent)

    Quand comprendrez vous que votre monopole de la diffusion est terminé ?

    Vous ne pouvez plus assèner la Légalité d’une décision d’un apareil de l’exécutif comme Légitime, le conseil d’état n’est d’aucun façon lié à l’expression citoyenne, et n’est composé d’aucun élu, ni de legislateurs ni de magistrats.

    Cela fait la deuxième fois que la commission de la RCP se fait épinglé et la deuxième fois que les décisions du CE n’implique aucune rétro-activité…

    J’ai envie de dire qu’il vous suffit de faire preuve d’originalité pour votre prochain larcin jusqu’à être à nouveau épinglé mais garder les bénéfices des irrégularités grâce à cette étonnante clémence du CE !

  5. Ben dit :

    Ah, et d’autre part, j’ai beaucoup de mal à envisager le fait que les importateurs de matériels d’enregistrement soient des « entreprises qui ont détruit des milliers d’emplois en délocalisant les fabrications dans le sud-est asiatique ».

    Par définition, un importateur importe dans notre pays, non ? Comment peut-il délocaliser dans le sud-est asiatique ? Les producteurs de tels matériels, eux, ne se sont pas gênés. Mais c’est un autre débat.

    Enfin, pour revenir sur votre commentaire précédent disant « Celui qui a été épinglé c’est la législation française et pas la commission les nombreux griefs des importateurs ayant été rejetés par le Conseil d’Etat », rappelons tout de même que plusieurs décisions de la commission copie privée ont été annulées par ledit Conseil d’Etat.

    • Pascal Rogard dit :

      Les industriels ont délocalisé la production et sont devenus importateurs

      • loy dit :

        Rappelez moi, niveau musique/cinéma/séries (on pourrait ajouter le livre traduit ou non), la part de marché de ce qui est purement français? Estimer ce qu’il en resterait si on laissait les diffuseurs choisir sans quotas et avec alors les seuls goûts du public en objectif?

        Ce n’est pas une industrie ayant délocalisée… mais capitulée faute d’avoir à se battre énergiquement: Taxes et subventions tombent quand même.

Laisser un commentaire