Les brumes de Tallin

19 septembre 2016 par - Weblog

©20th Century Fox

Finalement, il n'y a pas eu de soirée " magie noire " au Berlaymont .

Les grandes entreprises américaines spécialistes de l'optimisation fiscale  et les pasionarias du marché unique numérique n'ont  pas réussi à envouter le droit d'auteur et à le faire disparaitre dans les brumes de Tallin.

La communication de la commission européenne ne mérite ni excès d'honneur ni indignité , juste la note moyenne qui convient à un exercice technocratique essayant de tenir un équilibre entre la protection du droit d'auteur et les innombrables récriminations de tous ceux qui veulent l'affaiblir pour accroitre leur chiffre d'affaires ou piller sans vergogne la propriété littéraire et artistique.

Partie trop vite et trop fort en faisant du droit d'auteur sa deuxième priorité , la commission européenne a du revoir ses ambitions pour obéir au principe de réalité et tenir compte de la mobilisation des créateurs européens et du rejet de la majorité des commerçants du secteur dont les modèles économiques auraient été ruinés par la fin des règles de territorialité.

Le gouvernement français garant en Europe du respect de la propriété littéraire et artistique s'est aussi brillamment illustré dans la foulée de son combat pour la défense de l'exception culturelle pour remettre la création au centre des préoccupations et réaffirmer haut et fort que la culture est un des atouts majeurs de l'Europe et que son avenir dans l'environnement numérique passe par une protection renforcée des oeuvres , une lutte sans merci contre la peste de la piraterie et une juste rémunération des auteurs.

Mais l'exercice qui aurait pu conduire à insuffler dans la société numérique la force des créateurs et de leur talent reste au final pauvre d'espérances car oubliant deux des piliers qui favorisent la circulation des oeuvres le principe de rémunération proportionnelle et la revendication légitime déjà adoptée par le Parlement français unanime d'une exploitation suivie .

Au fonds ce qui manque à la commission c'est la force d'un idéal et une vision politique allant au delà du réalisme des petits calculs qui répondent aux sollicitations des intérêts catégoriels.

La bonne surprise et l'action du gouvernement et créateurs français n'y est pas pour rien est dans la proposition de révision de la directive sur les services de médias à la demande.

En creux la commission reconnait l'insuffisance de la règlementation actuelle et la nécessité de renforcer la présence des oeuvres européennes sur ces services ainsi que de lutter contre la concurrence déloyale des champions de l'optimisation qui apprécient les vertes vallées de l'Irlande, le charme des polders hollandais et la discrétion luxembourgeoise.

La commission propose et c'est bien faible un contingent minimum d'offre de 20% d' oeuvres européennes et la fin du principe du pays d'origine en matière d'investissement dans la création pour appliquer les règles du pays de destination là où sont collectées les ressources qui financent le service .

Il faut  espérer que le Parlement améliore le dispositif et déjà deux parlementaires de la commission culture Sabine Verheyen et Petra Kammerevert ont déjà proposé de relever à 30% le taux d'œuvres européennes et de renforcer les dispositions visant à responsabiliser les plateformes.

Un rayon de soleil  ne fait pas le printemps , mais les brumes de Tallin se dissipent et avec elles les croyances irrationnelles opposant création et services numériques .

 

 

 

 

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