Des hommes d’exception

7 décembre 2011 par - diversité culturelle

Photo//Pierre Leblanc

La coalition française pour la diversité culturelle a remis lundi dernier ses premiers  prix récompensant une manifestation qui y contribue brillamment le festival musiques métisses d'Angoulême et deux personnalités exceptionnelles Jean Musitelli et Jacques Ralite.

Jean Musitelli ambassadeur de France qui fut conseiller diplomatique et porte parole de François Mitterrand en fin connaisseur des couloirs de l'Unesco a fortement contribué à l'adoption rapide de la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.

En tant qu'expert représentant le gouvernement français  il participa à la rédaction l'avant projet de convention dont la qualité fut telle que l'Assemblée générale suivante vota à une majorité écrasante le texte soumis à son approbation.

Homme cultivé , courtois et pondéré, il est un des hauts fonctionnaires qui ont permis à la diplomatie française de faire rayonner nos idées et surtout de les faire partager par beaucoup d'autres Etats dans les enceintes internationales.

Mais l'administration ne peut rien sans l'impulsion politique. Même si François Mitterrand lui refusa ce à quoi ils aspirait profondément être ministre de la culture Jack Ralite a marqué de son empreinte le combat pour l'exception puis la diversité culturelle.

Homme de terrain capable d'implanter un théâtre dans des zones supposées inhospitalières , il a été de toutes les batailles qui du Gats à la convention Unesco en passant par l'Ami ont conduit les artistes les auteurs et les techniciens à défendre cette idée simple la culture n'est pas une marchandise.

Fondateur et animateur des Etats généraux de la culture, il a su au Sénat faire entendre dans tous les débats la voie singulière de ceux qui aiment les artistes refusent le sectarisme et apporter une contribution précieuse aux travaux de la très consensuelle commission des affaires culturelles.

Tous ceux qui participèrent aux heures glorieuses des rencontres cinématographiques de Beaune ont encore en mémoire ses échanges fermes mais courtois, ponctués de belles citations avec le très francophile Jack Valenti admirateur de Charles Maurice de Talleyrand Périgord  qui défendait les intérêts des majors d'Hollywood.

A l'heure où certains épigones de J2M veulent à nouveau en finir avec l'exception culturelle, c'est avec fierté  qu'au nom de l'ensemble des organisations membres de la coalition, j'ai pu adresser à deux hommes d'exception ce témoignage de reconnaissance.

Je ne résiste pas en conclusion de ce billet à reproduire intégralement le discours que Jack Ralite prononça la semaine dernière pour clôturer l'hommage que responsables politiques et créateurs lui rendirent dans son cher Théâtre de la commune à Aubervilliers. Un discours qui nous entraine à une époque où Jack Ralite ne savait pas encore qu'il deviendrait Jack Ralite.

 

" Chacune, chacun d’entre vous,

 Merci de votre présence qui me touche beaucoup et fait ressurgir en moi tant de « souvenirs de l’avenir » dirait Aragon. Vos mots et silences entendus, si affectueux, s’accrochent comme des notes de musique sur la portée de ma vie. Je me sens en complicité, en entente presque spontanée avec vous. Il y a dans ce Théâtre de la Commune qui va avoir 47 ans comme une alliance mystérieuse avec un moment ou un autre de ma vie, avec le sens que j’ai essayé avec plus ou moins de bonheur, de lui donner et qui par moment risque de retenir mal des « perles de larmes ». Vous avez enclenché comme le déroulé d’un petit film dont la vision attentive, et l’écoute éperdue, me confirment que le fil rouge de ma vie est la fulgurance de Rimbaud « Je est un autre, à chaque être plusieurs vies me semblent dues ». Je n’évoquerai pas tout. Vous qui m’avez connu entre 31 et 83 ans, pendant les 52 ans où j’ai représenté -c’est un honneur- la rude et tendre population d’Aubervilliers, j’ai envie d’épeler l’alphabet de mes pratiques et pensées avant, surtout dans mon enfance qui me semblent avoir été déterminantes et peut-être vous éclaireront l’adulte que je suis devenu.

 

Je suis né le 14 mai 1928 à Chalons sur Marne dans une famille d’artisan, taxi et ambulancier, avec quatre frères et sœurs, dont ma jumelle. Ma mère était coiffeuse et d’une grande exigence tendre, pour tout ce qui touchait à l’instruction et à la culture. Mon père était souvent silencieux et travaillait énormément. Grâce à eux je suis allé au cinéma, tous les dimanches, de 6 à 16 ans, en famille, le premier film étant « Les Misérables » avec Harry Baur et Charles Vanel. Nous avons dû quitter la salle (parce que je pleurais bruyamment), j’avais 40° de fièvre, m’insupportant de voir le personnage jouer par Carette écrasé par la roue d’une charrette à Montreuil sur Mer, sous le regard de Javert. J’ai appris le violon 8 ans, et commencé avant 10 ans à dévorer les livres. A 14 ans l’un d’eux m’inonda d’avenir, d’allégresse et de liberté sur tous les plans jusqu’à l’intime « Le Rouge et le Noir » de Stendhal. Je crois être encore amoureux de Madame de Rénal, prenant la main de Julien Sorel dans son jardin à Verrière en Franche-Comté. Et aussi « Adolphe » de Benjamin Constant, …..l’amour impossible. J’ai adoré un livre d’histoire « Les Caractères Originaux de l’Histoire Rurale Française » qui m’a attaché au moyen-âge. Je l’ai lu comme un roman plein de charme et de suggestions, qui a fait que la première institution française à porter le nom de Marc Bloch est une école d’Aubervilliers en 1967. Marc Bloch, qui fit sa thèse sur les « Serfs » au Moyen-âge, fut un immense historien résistant, dans ma vie, c’est aussi une idée profonde dans son ouvrage écrit à chaud en juillet 40, « L’Etrange Défaite » : « Quel pauvre cœur que celui qui ne serait pas autorisé à avoir plus d’une tendresse ». Aussi les discours de Robespierre que m’a fait découvrir mon professeur d’histoire. Je les lisais le soir, tout haut, et j’ai pour « ce guillotiné de naissance » comme l’appelait Julien Gracq qui l’appréciait hautement, une affection née à l’âge de 6 ans, quand au cours préparatoire, l’instituteur, qui avait fait un petit chemin historique autour de la classe, m’a placé à côté du 18ème siècle, où il y avait une figurine de Robespierre, avec cette éclatante appréciation : « L’incorruptible ». Je me vois interrogeant le maître : « Monsieur, monsieur qu’est-ce que ça veut dire incorruptible ? ». C’est le premier mot politique que j’ai appris et qui me lie à la mémoire de cet homme d’une grande actualité pas seulement pour son incorruptibilité. Un dernier livre, fondateur, de mon esprit, « L’affaire Dreyfus » par Jacques Kayser. L’homme me glaçait un peu, sa rigidité, sur de vieilles photographies, mais quelle puissance humaine, quel courage, face au pouvoir de l’antisémitisme gangrénant l’armée. Depuis, j’ai lu l’échange de lettres avec sa femme Lucie Hadamard : un courrier d’amour qui lui permit de tenir face au « coup de foudre épouvantable dont mon cerveau est ébranlé » disait-il. Il resta 4 années à l’Ile du Diable que j’ai survolé en Guyane lors d’une visite ministérielle. Nous avons tourné en hélicoptère plusieurs minutes autour de ce camp de concentration pour une personne à la pointe la plus élevée de la conscience humaine. Cet homme a réussi à supprimer des impossibilités. Ces livres tiennent à ma maman.

 

D’autres choses tiennent à mon papa. En 1941, il livrait le lait chaque dimanche à l’hôpital psychiatrique de Chalons, avec moi et invariablement arrivant aux cuisines, derrière la vitre, une trentaine de visages féminins apparaissaient ressemblant à des bécassines. Quand nous repartions, à la sortie de la Chapelle de l’hôpital, on croisait des personnes habillées en personnages de l’histoire. Le mot « fou » n’était pas prononcé, mais me pénétrait et ne m’a depuis pas quitté tant de problèmes tournant autour de ces êtres connaissant un déchirement de la conduite et créant cette peur qui repose sur l’illusion d’une vie sécurisée totalement. On crie au barbare, au déséquilibré, à l’arriéré, au fou, comme autrefois on criait au loup. Mais qui est le barbare, l’être étrange, qui a quitté la ligne, l’attitude commune, l’homme dont le discours hoquette et s’égare, dont la confiance traverse des gouffres ? L’homme qu’on ne regarde pas, à qui on ne sourit pas, qu’on laisse à l’écart de l’autre côté vers les rives de l’indéfinissable, dans un périmètre restreint ? Ainsi, se déconstruisent les liens sociaux. La guerre civile habite l’âme. C’est dénégateur d’humanité. Le bacille de la barbarie s’empare de trop d’entre nous.

 

En pensant aux livraisons de lait avec mon père, je me suis mis à respecter ces êtres à qui l’Etat propose la norme alors que la normalité c’est la victoire de l’état sur le devenir, de l’identité sur la différence. Il ne faut plus d’hommes, de femmes entrés dans des histoires closes et privées du « risque de vivre », seul moyen d’avoir le « risque de guérir » tout cela étant caché par l’abominable mensonge du risque zéro.

 

Le repas du soir à la maison était intangiblement à 19 heures et mon père revenait souvent d’une visite sur les terrains de la grande tuerie de 1914 avec des veuves espérant trouver une alliance, un bijou, un bouton même, souvenir éternisant leurs époux emportés par les balles, les baïonnettes, voire les couteaux. C’était un leitmotiv des repas où est née ma haine de la guerre. Devenu maire d’Aubervilliers j’ai toujours parlé le 11 novembre sur ce qui défigura tout le 20ème siècle.  « Les croix de bois » ont submergé mon enfance.

 

Les dix étés de 1933 à 1943, j’ai passé mes vacances dans une ferme sans eau, sans gaz, sans électricité, sans toilettes, avec cinq enfants de 16 à 25 ans et six vaches, à Neuvic d’Ussel en Corrèze, j’ai appris à « étriper la terre comme on désarticule un jouet » dirait Leroi-Gourhan, j’ai appris tous les gestes de la traite des vaches au battage au fléau, du fauchage à la serpe du blé noir à la fabrication du pain, de la garde du bétail à l’aube dans les châtaigneraies aux soirées d’écossage des haricots pour l’hiver, tout cela « vécu comme une école d’attention qui se tourne vers ce qui a toujours échappé au regard et qui y découvre la réalité et la surréalité la plus dense » lit-on dans « Le paysan de Paris » d’Aragon. Ces intenses étés à la ferme ont été pour moi passeurs du concret qui dans sa banalité et son aspect quotidien ouvrent sur la découverte. En rentrant de vacances, pour le 1er octobre, je ne voulais pas que ma maman lave ma blouse qui sentait les vaches. Admirables vacances dans le réel que le gamin que j’étais transfigurait.

 

Un événement eut lieu en novembre 1942, à 14 ans, au lycée dont la moitié des locaux était occupée par des soldats allemands. Un matin le surveillant général entre dans la classe, appelle trois noms dont le mien et nous conduit chez le Principal. On entre, il est debout, solennel, ses commissures des lèvres indiquent une immense émotion. A ses côtés un officier SS de la Gestapo, qui nous emmène dans quatre tractions avant, un enfant par traction, encadré de quatre gestapistes. 26 enfants sont successivement arrêtés, puis un surveillant, deux professeurs et le jeune abbé Graser du lycée qui en chaire avait dénoncé cette arrestation d’enfants. Les trois mois en cellule, seul ou à plusieurs, ont été interrompus par des interrogatoires giflants mais pas torturants. J’y ai rencontré un abbé (je suis athée), deux communistes (les premiers de ma vie), un mutin de 1917 (une figure devenue fondatrice pour moi), un haut fonctionnaire qui mourut en déportation. Chaque jour il rentrait d’interrogatoire, plein de sang (aujourd’hui je pense qu’il était un résistant de type Jean Moulin), un soldat de l’armée rouge (fait prisonnier à Stalingrad il s’était évadé et était tombé d’inanition sous le train en gare de Chalons). Une nuit, étant dans la cellule voisine, il perça avec une barre de son lit le mur nous séparant et nous nous sommes parlé un instant en allemand. A postériori c’était comme si la chute de Berlin intervenait dans ce coin de prison. Entrant en 6ème en 1940, le professeur (nous étions 28) demandant quelle langue nous choisissions, 27 répondirent l’anglais, moi l’allemand. J’ai vu aussi à Noël une délégation de « charitables » du Secours National. Ce mot m’a blessé pour toujours leur venue étant une comédie de solidarité. On avait balayé. On était sur le pas de la porte, la délégation est passée sans s’arrêter et a tourné la tête pour nous regarder après nous avoir dépassés. C’est là que le mot dignité a atteint mon cœur.

 

Quand je suis sorti de prison, mes parents m’ont envoyé chez une tante au Raincy huit jours. Elle m’a emmené 2 fois, devinez… au théâtre, à l’Athénée où Pierre Dux mettait en scène « Colinette » de Marcel Achard avec Micheline Presles, François Perrier et Bernard Blier, jeunes débutants, puis au Théâtre de la Madeleine où Sacha Guitry donnait « N’Ecoutez pas Mesdames ». C’est là que j’ai été conquis par le virus du théâtre.

 

Des 88 jours encellulé dans une microsociété d’une force inouïe, la seule personne que j’ai revue à la Libération et jusqu’à son décès, en septembre 2006, c’est l’Abbé. Il a marqué ma vie. Rentrant des camps, nous étions allés à quelques uns des 26 à la Gare de Chalons. Autorisé à nous voir avant de gagner l’hôpital, il trébucha et tomba sur moi. J’ai reçu sur mon visage la petite croix, mal foutue, qu’il portait au cou. « L’abbé elle est drôle votre croix », « Jack tu ne devrais pas dire cela, les nazis me l’’avaient arrachée, c’est un déporté ouvrier menuisier communiste de Vitry sur Seine qui m’a fait celle-ci, je la trouve très belle ». Ce jour-là, je suis devenu communiste. Il y a 5 mois, Luciana Castellina, une grande militante communiste italienne, me téléphona. Cette femme qui fonda « Il Manifesto », ancienne Présidente de la Commission Culturelle du Parlement Européen, âgée de 87 ans, continue à parcourir le Monde, me prévenait d’une causerie qu’elle faisait au centre culturel italien pour la sortie d’un livre non encore traduit reprenant son journal de jeune fille à la Libération. J’y allais. Joie des retrouvailles, doublée de celle de voir le même jour Berlusconi perdre Milan et d’autres villes. Elle parle. Evoquant les années 45, 46, 47, un gourmand d’anticommunisme l’apostrophe sur son engagement, elle, enfant de la grande bourgeoisie italienne, elle répond impitoyable : « A cette époque après le retour de la liberté, vers qui vouliez-vous aller si vous espériez un monde meilleur ? il n’y avait que les communistes, c’est ce que j’ai fait ».

 

Moi aussi. Avec un compagnon inoubliable, le plus grand ami que j’ai eu, André Karman, Lord Maire d’Aubervilliers disait Adamov. Fraiseur chez Malicet, résistant à 17 ans, déporté à 18 ans, gravé « mort » par erreur sur une pierre magnifiant sa jeune vie, revenu de Dachau, un des secrétaires de la Fédération de la Seine du Parti Communiste Français, secrétaire de la jeune Fédération Seine Nord-est, puis écarté. Elu maire en 1957, il insista avec sa gentillesse proverbiale pour que je sois l’un de ses adjoints. Ayant accepté, j’ai vécu 25 ans de compagnonnage militant exigeant, libre et lumineux qu’interrompit son grand départ en 1984, démâté par l’accumulation des maux de Dachau. Cet homme et son œuvre sont ineffaçables à Aubervilliers, comme l’est celle de Waldeck Rochet, notre bon député des années soixante.

 

Voilà mes racines, mes mêlées, mes turbulences, la construction de mon bonheur de l’époque.

 

Je n’oublie pas non plus mon passage à l’Humanité Dimanche, à la rubrique de télévision, que nous avons fondée avec Jean Rabaté, qui m’a fait découvrir les Buttes Chaumont, et ce qui s’y faisait de beau et de populaire dans tous les domaines de la création artistique. Merci à ceux qui faisaient ce travail, notamment à Pierre Dumayet qui vient de nous quitter, merci à André Carrel, rédacteur en chef de l’Humanité Dimanche, qui m’en a ouvert les portes.

 

Je veux être franc, malgré les vicissitudes, leur immense gravité, je suis comme Luciana Castellina, ça n’est pas épuisé.

 

Habitant et vivant en banlieue, autrefois communs de Paris, puis commodités, aujourd’hui engagé dans la fraternité à développer, je dis que ça n’est pas un monde à part, même si cette image lui colle à la peau : banlieue béton, banlieue ghetto, quartier d’exil, enfants des rues et de toutes les souffrances, lieux de tous les dangers. Ce regard divise. Non la banlieue n’est pas une maladie sociale, c’est la société toute entière qui est malade. Ceux qui souffrent et galèrent dans leur diversité ne sont pas des gens à part, ils peuvent être source d’innovation à la mesure des déchirements dont ils sont victimes quand on les considère comme en trop dans la société surtout quand leurs noms sont étrangers, avec la déliaison du « lien social » qui s’ensuit, au milieu de la violence de la financiarisation, de la marchandisation et de l’évaluation chiffrée.

 

Et pourtant. Je ne suis pas aveugle. Je pense comme Aragon dont le personnage central de la « Mise à mort » s’écrie : « Quel désordre mon dieu, quel désordre ! il n’y a pas que moi qui ai perdu mon image. Tout un siècle ne peut plus comparer son âme à ce qu’il voit, et nous nous comptons par millions qui sommes les enfants égarés de l’immense divorce ». Il faudrait un grand développement, ce n’est pas le lieu, pour déplisser ce réel évoqué et esquisser le nouveau déjà perceptible même en désordre qui n’est pas l’effacement d’hier mais sa critique mêlée aux métamorphoses.

 

Quelques repères pillés à des créateurs :

 

« Mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde » (Albert Camus)

 

« Laisser aller le cours des choses voilà la catastrophe » (Walter Benjamin)

 

« Méfies-toi de ceux qui se déclarent satisfaits car ils pactisent » (René Char)

 

« Là où croît le danger croît aussi ce qui sauve » (Hölderlin)

 

« Le pluralisme serait un malheur si chacune de ses composantes n’avait pas d’hospitalité pour l’autre » (Massimo Cacciari)

 

« L’herbe même il faut la faucher afin qu’elle reste verte » (Heiner Müller)

 

« L’histoire est ce qu’on y fait, l’histoire est une chose qu’on agit et non pas qu’on subit » (Pierre Boulez)

 

« Nous sommes dans l’obligation de civiliser les nouveaux nouveaux mondes issus de l’œuvre civilisatrice » (Georges Balandier)

 

« Nous avons tous un héritage et nous devons le défendre, mais dans un même mouvement nous devons aussi nous en défendre. Autrement nous aurions des retards d’avenir, nous serions inaccomplis » (Predrag Matvejevic)

 

« L’inaccompli bourdonne d’essentiel » (René Char)

 

Pour faire, nous avons deux idées du psychologue soviétique Vygotski, en 1920 qui n’ont pas été entendues comme elles le méritaient : « L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées », « Les hommes et les femmes peuvent se retrouver une tête au-dessus d’eux-mêmes ». Georges Canguilhem, cet auteur de pensées dérangeantes et constructives a écrit : « La vie est habituellement en-deçà de ses possibilités, mais se montre au besoin supérieure à sa capacité escomptée ».

 

C’est cela qui chemine en ce moment et pourvu qu’on résiste à ce que Bernard Noël appelle « la castration mentale », on peut « décongeler » la situation et faire fructifier le « pouvoir d’agir » de chacune, chacun.

 

Là intervient la question fondamentale de l’approche du travail, des activités, et rien n’a été dit de plus fort sur cette question trop encore ignorée : « Au travail, contrairement aux apparences, on ne vit pas dans un contexte, on cherche à créer du contexte pour vivre ». C’est d’Yves Clot, titulaire de la chaire de psychologie du travail au CNAM.

 

Comme vous le pressentez, le devinez et le voyez : « Nous sommes dans l’inconcevable, mais avec des repères éblouissants… » disait René Char. J’ajouterais avec une histoire. "

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Commentaires (1)

 

  1. Jack Moyal dit :

    Magnifique discours qui nous dit tout sur son humanisme. J’ai fait sa connaissance ,il y a bien longtemps ,lors du festival des courts métrages qui se tenait à Grenoble. Et très souvent au hasard des théâtres ou bien lors des pièces de son ami et compère Gabriel Garran.
    Jack était un grand homme de culture, qu’il repose en paix.
    Merci d’avoir publié ce discours.

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