L’heure des comptes

3 avril 2014 par - audiovisuel

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Système inefficace épinglé...carton rouge...mauvais points... telle est la présentation faite par la presse du rapport de la Cour des Comptes sur les soutiens à la production cinématographique et audiovisuelle.

Je doute pourtant que les excellents journalistes spécialistes de ces questions aient été au bout des 273 pages de ce travail dense et fouillé qui explique en détail un système fort utile mais sans doute trop complexe car par certains cotés il ressemble  aux tuyauteries du film Brazil.

Et il est vrai que certains tuyaux perdurent car il y a toujours des professionnels assoiffés qui espèrent en recevoir quelques gouttes.

C'est le propre des journaux de simplifier les sujets compliqués et ce d'autant plus que la méthode de travail de la Cour des Comptes a conduit à faire largement circuler des documents préparatoires que des gens peu scrupuleux et mal intentionnés  ont ensuite habilement fait fuiter avant que le rapport définitif ne soit adopté .

A vrai dire même si chaque secteur  cinéma et audiovisuel reçoit sa volée de bois vert la Cour des Comptes reconnait honnêtement que globalement  la politique du cinéma est une réussite qui fait de notre pays celui qui " résiste le mieux à la concurrence du cinéma américain."

En effet aucun facteur autre que  la politique constante suivie depuis près de 70 ans n'explique que notre cinéma soit de très loin le premier d'Europe qu'il s'agisse de la production ou des résultats d'exploitation fruits d'un maillage dense  moderne et numérisé du territoire .

Par contre en ce qui concerne la production audiovisuelle , les résultats sont moins probants , les oeuvres françaises ayant plus de mal à affronter la concurrence des séries américaines .

Mais là il est difficile d'en imputer toute la responsabilité aux mécanismes réglementaires car à conditions inchangées ou peu modifiées les chaînes de télévision  ont toutes connu des périodes creuses qu'explique en partie une mauvaise configuration des relations triangulaires entres auteurs producteurs et diffuseurs.

Sur beaucoup de points la Cour des Comptes donne l'impression d'un boxeur qui donne des coups dans le vide car à l'initiative d' Aurélie Filippetti relayée par la détermination de Frédérique Bredin les pouvoirs publics ont compris la nécessité de changements profonds et en particulier  d'une plus grande transparence à tous les étages, transparence qui est le fil d'Ariane du rapport de René Bonnell.

Il ne faut surtout pas jeter le bébé avec l'eau du bain .

Le principe fondamental de notre système qui consiste à faire remonter sur la création, les recettes de la diffusion doit être préservé et surtout adapté pour que les grands singes numériques cessent de  planquer  leurs bananes dans des iles paradisiaques et  participent aussi au financement des oeuvres .

Mais réaffirmer ce principe n'éxonère pas des réformes d'application impérativement nécessaires pour lui redonner clarté, lisibilité et meilleure efficacité.

La piqure de rappel  de la Cour des Comptes aura peut-être le mérite de secouer la gente corporatiste toujours prompte à se réfugier derrière les mystères de la création pour pousser son cri de guerre " circulez y ' a rien à voir ".

Car rien n'est jamais acquis comme en témoigne le formidable succès des bureaux de Bercy qui par des systèmes divers et variés de ponction,  plafonnement, écrètement ont  inventé un nouveau concept la surtaxation des activités culturelles qui est indéniable dès lors que les ressources spécifiques normalement affectées au développement de la création et de la diffusion sont reversées au budget général.

Tout cela est malsain, pervers et porteur de graves déconvenues pour un Etat réduit à l'expédient de détourner à son profit des fonds créés pour d'autres usages.

Il est clair aussi  que la Cour des Comptes a raison de demander une véritable prise en compte des services numériques dans le système d'aide du CNC.

L'enjeu est majeur car il s'agit comme cela a été parfaitement réussi pour l'équipement des salles de cinéma d'une adaptation indispensable à un environnement économique en pleine mutation.

Ceux qui ont conçu les systèmes d'aide au cinéma puis à l'audiovisuel étaient des pionniers visionnaires .

Souhaitons  pour l'avenir de la création française que leurs  successeurs soient aussi inspirés, imaginatifs et déterminés à s'opposer aux immobiles.

 

 

 

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Commentaires (3)

 

  1. LucienVéran dit :

    RAS.

    Commentaire du président de canal plus : « Je vous informe que ce rapport n’appelle pas d’observations de ma part. » …et dix pages de commentaires du président de France Télévision. Faut-il y voir un signe ? je vais le lire en entier pour me faire une idée;

    Bonne journée.

    Lucien Véran. Aix Marseille Université.

  2. cette page dit :

    Merci pour ce billet c’est très instructif !

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