Les fesses de nonnes

24 octobre 2011 par - Weblog

Les rencontres cinématographiques de Dijon toujours parfaitement organisées étaient cette année placées sous le signe de l'Europe, mais c'est la politique cinématographique et audiovisuelle française qui a largement dominé les débats même si curieusement les responsables de la chose publique brillaient par leur absence .

En invité surprise, l'Assemblée Nationale a accaparé les esprits avec un amendement inattendu du gouvernement plafonnant  taxe par taxe les recettes du CNC.

Un écrètement global portant atteinte de façon exceptionnelle à l'autonomie budgétaire du CNC était certes  attendu, mais la mesure proposée par Berçy allait encore plus loin en remettant en cause le système de soutien automatique qui fait la force du cinéma français dans toute ses composantes création, production ,distribution et exploitation.

Le CNC est en effet victime des tricheries de certains opérateurs de Télécom qui en majorant artificiellement   l'assiette télévisuelle de la TVA à taux réduit ont  gonflé pour un temps ses recettes créant en ces temps de disette budgétaire et d'alignement sur les recommandations des agences de notation un fort désir de ponction des docteurs spécialistes de la saignée.

L'amendement voté en dépit de l'opposition résolue du groupe socialiste, il reste à espérer pour le cinéma français un vote contraire du Sénat désormais controlé par la gauche et un soutien déterminé du Président de la République qui voit ainsi contredites par les manoeuvres des budgétaires les fermes assurances données aux professionnels qu'il avait récemment convié à déjeuner et toute sa politique de défense du droit d'auteur.

Il faut aussi rappeler que le CNC a apporté une importante contribution à la réduction des dépenses budgétaires en récupérant une charge nouvelle de 50 millions d'euros de dépenses publiques auparavant imputées sur les crédits du Ministère de la culture et de la communication.

Le cinéma français devrait  retenir la leçon  que la balkanisation de sa représentation professionnelle et les méthodes douteuses de certaines de ses composantes ont un prix.

En cette période de grave crise, l'avenir doit être pensé en terme d'innovation et non en s'accrochant comme un vieux singe à un cocotier menacé par les vagues géantes qui viennent de l'Internet.

Le débat phare des rencontres était aussi franco-français et réunissait dans un brillante distribution artistique Nonce Paolini,Rémy Pflimlin, Rodolphe Belmer,Nicolas de Tavernost,Xavier Couture et Eric Garandeau.

Rodolphe Belmer prenant l'humble posture qui sied aux vrais puissants expliqua que le rachat des chaînes du groupe Bolloré était une petite opération dont le principal objectif était de muscler la création française avec des oeuvres "de classe internationale" permettant à son groupe de résister à la déferlante des géants américains favorisée par le développement de la télévision connectée.

Nicolas De Tavernost félicita le directeur général de Canal plus pour ses talents de romancier et lui conseilla de s'inscrire à ce titre à la SACD ce qui dénote pour le moins une connaissance imparfaite du répertoire dont nous gérons les droits.

Plus sérieusement , il indiqua que la fiction française pouvait être  parfaitement financée en associant comme ce fut déjà le cas les forces de la chaîne à péage et celles des grandes chaînes en clair sans qu'il fut besoin pour l'opérateur dominant de concurrencer ses voisins du gratuit.

Quant à Nonce Paolini,il ironisa sur la fiction Borgia plus regardée pour l'exposition sensuelle des " fesses de nonnes " que pour les roueries politiques du pape,indiquant que de tels programmes étaient indiffusables sur une télévision généraliste en raison des contraintes spécifiques qui pèsent sur elles.

Il était amusant pour les connaisseurs avisés de voir la tendre,troublante et nouvelle amitié née entre le patron de TF1 et celui de M6 donnant ainsi à Rodolphe Belmer le role imprévu de Madame Desachy du Paf.

Ce beau monde retrouva consensus pour critiquer les " Nouveaux entrants ,premiers sortis " plus habiles à encaisser grace aux fréquences mises gratuitement à leur disposition d'importantes plus values ressortant du secteur qu'à respecter leurs promesses d'investir pour cent ans dans la communication audiovisuelle.

Enfin de façon surprenante l'ARP proposa dans son communiqué final la création d'un secrétariat d'Etat à l'économie numérique de la culture. Ceux qui ont expérimenté cette de formule de sous ministre savent qu'elle est porteuse de conflits permanents et d'inefficacité.

Non ce dont nous avons besoin c'est d'un ministère à forte densité politique réunissant les missions de la culture, de la communication et de la société de l'information.

 

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Commentaires (6)

 

  1. losy dit :

    Il faut dire que la saignée était historiquement une pratique touchant les riches! Les seuls qui, sans sécu, pouvaient payer le docteur…

    Je trouve ceci bien moins injuste qu’une taxe touchant désormais la globalité d’un abonnement internet… moi qui ait un abonnement internet nu, sans aucun service associé, même pas une box d’opérateur.

    Les FAI n’auraient en réalité jamais dû se muer en diffuseurs de médias et rester dans leur pur rôle télécom… et rentrer là dedans à travers des filliales qu’il aurait été bien plus difficile de taxer qu’un abonné qui n’a pas le choix, même s’il n’est pas concerné.

    Au final tout ceci va provoquer encore un peu plus de défiance du public vis à vis de votre corporation… sans qu’elle en touche l’intégralité des subsides!

    Politiquement, c’est très fort… mais les gens ont voté pour…

    • Pascal Rogard dit :

      Ce sont les opérateurs qui ont allumé la mèche en élargissant de façon inconsiderée l’assiette de la TVA à taux réduit
      Quant à l’offre de haut débit incluant la télévision elle a été appréciée par de nombreux consommateurs qui l’ont souscrite .

      • losy dit :

        L’offre globale a bien souvent été souscrite faute de choix et n’est même pas toujours techniquement possible donc effective!

        La faute comme vous dite à cette TVA réduite qui a aussi poussée les opérateurs au tout triple-play… possible tant que c’était du gagnant-gagnant même pour ceux qui n’avaient pas la TV via l’ADSL.

        Avec ce biais, peut-on réellement parler de succès commercial d’une part… et est-il possible d’autre part que ce modèle continue à se perpétuer?

  2. Lucien Véran dit :

    Premium.

    Une question n’a pas été posée lors de la tenue du panel « premium » à Dijon à propos du paradoxe du premium gratuit. Etant entendu entre experts (?)que le ménager et la ménagère moyens qui fréquentent TF1 et M6 ne sauraient supporter la vue d’un cul de nonne (au moins en prime time) la chaîne gratuite de C+ ne saurait être que du « premium dégradé » pour CSP- et ne saurait donc attirer que des gentils annonceurs du bas et du moyen de gamme. L’argument comme quoi C+ aurait sa part réservée chez les gentils annonceurs upper class qui les suivraient sur le gratuit ne semblerait alors pas tenir.On peut formuler une fois de plus la question ainsi, existe-il quelque part du premium gratuit ? Si oui cela doit-il ressembler à Arte (premium public pour CSP bac++)ou à Paris Première (premium people tendance quais de Seine) ?

    Bonne journée.

    Lucien Véran.

    Université Paul Cézanne – Euromed. Marseillewebfest.

    • Pascal Rogard dit :

      Je crois que dans l’esprit de Rodolphe Belmer canal plus visera aussi sur le clair les Csp + Je pense que la réponse est a chercher du coté du clair de C+ et du Cinema d’auteur et de patrimoine.amitiés

      • Lucien Véran dit :

        C’est probable en effet, il nous manque un équivalent TCM en gratuit, mais le projet d’Allociné s’il « monte » sur la TNT pourrait venir aussi combler en partie ce vide.

        Bonne journée.

        Lucien Véran.

        Université Paul Cézanne – Euromed. Marseillewebfest.

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